Il Maestro, Hommage à Claude Jeancolas,

Historien d’art, homme de presse, écrivain, ami cher, Claude Jeancolas s’est éteint le 10 février 2016. Auteur de 19 ouvrages sur Arthur Rimbaud, il laisse en héritage l’œuvre d’une vie passionnée. Consacrée à l’art et aux autres.

Maestro ! C’est ainsi qu’un restaurateur italien avait choisi de surnommer un habitué de son établissement : le directeur parisien des revues Marie Claire Maison et Home, régulièrement de passage à Milan jusqu’à 2012. Une anecdote qui faisait sourire Claude. Le restaurateur avait vu juste.
Erudit, généreux, engagé, Claude Jeancolas était passé maître dans l’art de communiquer ses passions. Avec une ferveur toujours savamment documentée et une énergie hors norme, il parvenait à mener à bien les multiples projets qui lui tenaient à coeur. D’autres auraient nécessité plusieurs vies. Lui était conscient qu’il n’en avait qu’une. Sur les pas d’Arthur Rimbaud, il savait qu’il y avait urgence à faire sens. Urgence à se rendre utile. A ne pas gaspiller le temps. 

Sur les pas d’Arthur
C’est d’ailleurs sur le thème du sens qu’il avait découvert la force du poète. « Vous finirez comme un satisfait qui n'a rien fait, n'ayant rien voulu faire de votre vie ». En reprenant cette citation d’Arthur à son professeur Izambard dans la revue Max qu’il dirigeait, Claude Jeancolas reçut tant de courriers de ses lecteurs qu’il décida d’approfondir le sujet. Dix-neuf ouvrages consacrés à l’œuvre de Rimbaud ne suffiront pas à épuiser cette quête du sens. Dans sa vie personnelle aussi, Claude cherchait.

L’homme de lettres et d’action
En marge de son impressionnante carrière dans la presse et de son travail d’écrivain, il parvenait à s’organiser pour mettre également ses talents au service de ses proches. Sans enfant, il dédia sa liberté à aider les autres. A commencer par ses nombreux « fils » spirituels, des jeunes dont il changea les destins en leur prêtant main forte et en leur donnant confiance. A leur sujet, Claude se montra toujours très discret. Par affection et par respect.

Jamais ostentatoire, sa générosité s’exprimait aussi pleinement au travers de ses amitiés. Historien d’art et fin collectionneur de peinture florentine du XVIIème siècle, Claude Jeancolas resta toujours fidèle à la mémoire de son ami sculpteur Edmond Moirignot qui – peut-être le premier avant Rimbaud – lui avait ouvert les portes de son atelier et l’avait encouragé à laisser éclore sa passion pour l’art.

L’historien d’art
Exécuteur testamentaire de l’artiste, il consacra une fabuleuse énergie à faire vivre l’œuvre de son ami. A travers l’organisation d’une grande rétrospective à l’orangerie du Sénat puis la parution d’un catalogue raisonné, Claude Jeancolas s’efforça de donner à l’œuvre de Moirignot toute l’attention qu’elle méritait pour rentrer durablement dans l’histoire de l’art.
De Paris à l’Italie, de Djibouti à Tadjoura, il voyageait partout où la beauté du monde l’attendait. Entre un ouvrage en préparation, le projet d’acquérir un palais en Sicile où il pourrait se retirer pour écrire, celui de monter une vente chez Christies’ sur sa collection de manuscrits d’Arthur, Claude Jeancolas est parti trop vite emporté par la maladie. Sans jamais renoncer à ses rêves.
                                                                                                                                                                 Caroline Lebrun      

Claude Jeancolas photographié par Diego Porcel à l'entrée de l'exposition Moirignot, aimer, créer, rêver.
Claude Jeancolas photographié par Diego Porcel à l'entrée de l'exposition Moirignot, aimer, créer, rêver.   © DP
Rimbaud, photographie d'Andrew Brucker, réalisée dans l'atelier de Moirignot.
Rimbaud, photographie d'Andrew Brucker, réalisée dans l'atelier de Moirignot.   © AB